Résumé :
Médecin
Légiste / Anglaise / Showy / Avouez que mon curriculum vitae n'est pas commun !
Il y a certains traits de caractère qui ne devraient jamais être associés.
Imaginez-vous perchés sur douze centimètres de talons à découper des corps et à
voir l'âme des vivants. Oui, je l'admets, je n'ai pas choisi la facilité. Mais
lorsque vous aurez trouvé un moyen de lier un esprit cartésien et des dons de
voyance, vous me ferez signe ! Ah si ! Je tiens à préciser que je n'ai pas
vraiment eu mon mot à dire dans tout ça. Et puis bien entendu, il y a toujours
un grain de sable pour pimenter l'histoire. Et quel grain de sable !
Avis :
Pour
commencer, mention spéciale pour la superbe couverture signée Miesis, qui a
attiré mon attention sur ce livre. C’est sûrement ce que j’ai préféré, au
final.
Le
roman commence donc avec Aisling, qui est une Showy. Mais, qu’est donc une
Showy me demanderez-vous ? « Une Showy est une voyante. C’est
d’ailleurs littéralement ce que signifie le mot lui-même. ». Oui, c’est
vrai, sauf qu’en anglais, showy veut
bien dire voyant, mais dans le sens tape-à-l’œil, ostentatoire, et non dans le
sens divination, clairvoyance. Ceci étant dit, l’auteur choisit le vocabulaire
qu’il veut pour son background, mais,
pour moi, il y a un gros contresens. Ce souci de traduction n’est pourtant que
le début de ce qui ne me plaira pas dans ce (court) roman. Si l’écriture de
l’auteur est simple, voire simpliste, c’est sa façon entière d’envisager un
récit qui est à revoir.
Le background est inexistant : après avoir balancé
l’existence des Showy (« la transmission des dons de femme en femme et
ainsi de suite ». Ainsi de suite de quoi ??), il ne se passe rien. La
jeune femme distingue les auras, a des problèmes de vue, et ? Et rien en
fait, parfois c’est un don plutôt cool, parfois non. Fin du sujet. Cette
particularité lui aura au moins permis de devenir légiste. Là aussi, il va
falloir sortir les rames pour comprendre la logique de l’héroïne : elle a
des problèmes de vue, elle doit donc bosser de nuit, elle pense donc très
logiquement à médecin légiste. Mais où est la logique ?! Il y a des
légistes le jour aussi hein… Sans compter qu’on ne sait pas à quel âge Aisling
prend conscience de son don, ni ce qu’elle faisait de sa vie avant, mais ça ne
la dérange pas d’enquiller dix ans d’études derrière, médecine en plus, donc ce
n’est pas non plus donné à tout le monde. Mais, admettons, il y a pire pilule à
avaler. En effet, si comme moi vous aviez zappé la quatrième de couverture,
vous ne saviez pas qu’Aisling est anglaise. « Aisling avait quitté Londres
et son Angleterre natale pour Paris, la Seine et le bon pain ! Elle avait eu la
chance de décrocher son poste avant d’émigrer ; ils cherchaient un légiste,
même avec peu d’expérience, qu’ils formeraient aux lois françaises et qui
n’avait pas peur des horaires décalés. » Parce qu’en France, il n’y avait
pas un seul médecin foutu capable de faire l’affaire, on va recruter une
anglaise… Oui oui oui… Je passe sur les équivalences pour exercer en France,
surtout que la belle travaille à l’IML, la morgue de Paris (ce qui, au passage,
rend impossible l’intervention de la jeune femme au tribunal pour une affaire
alors que la victime est encore vivante. Ce sont les légistes des UMJ qui font
ça, car ils reçoivent aussi des victimes vivantes, tandis que l’IML ne reçoit
que des cadavres. À moins que la jeune femme soit détachée de temps en temps en UMJ, mais ça, l'histoire ne le dit pas), ce qui n’est pas donné au premier venu. On se demande bien
ce qu’elle fait là et on aura un bout de réponse avec ces extraits (le
« il » désigne Tristan) : « Il avait travaillé dur pour
faire en sorte qu’elle le rejoigne à Paris. […] il allait mettre à mal tout ce
qu’il avait mis en place ces dernières années. ». Ceci laisse supposer que
le jeune homme, qui va se faire passer pour un stagiaire, normal quoi, est
influent et qu’il a fait venir la jeune femme à Paris pour le poste de légiste,
par je ne sais quel miracle. Ce n’est pas la première fois, ni la dernière,
qu’une info arrive comme un cheveu sur la soupe, sans explication ni souci de
cohérence dans l’intrigue ou sa construction, c’est un défaut récurrent tout du
long, ce qui est très pénible. Bref, une fois qu’Aisling a raconté sa vie
jusque dans ses détails les moins intéressants, le lecteur peut, logiquement,
s’attendre à ce que l’intrigue intègre un meurtre ou au moins une affaire à résoudre
dans laquelle les dons de voyance de la jeune femme prendraient toute leur
importance. Mais non, pas du tout. Entre nous, elle aurait été vendeuse en
boulangerie et borgne, c’était pareil. Je reviendrai sur l’intrigue plus tard,
intéressons-nous un peu aux personnages.
Aisling est une jeune mère responsable
qui cède tout à sa fille au moindre caprice (je ne veux pas aller à
l’école ! Ok.), avec un sale caractère, peste insupportable et hautaine,
une vraie tête-à-claques qui donne envie de la gifler jusqu’à ce que mort
s’ensuive. Décrite comme une femme forte que tous les hommes trouvent désirable,
bien sûr, elle est surtout immature et inconstante, et finalement bien
malléable quand cela arrange l’auteur pour placer quelques scènes de fesse.
Elle n’a aucun souvenir de sa (ou ses ? je ne sais pas, ce n’est pas
clair) vie antérieure et est bouchée à l’émeri. Tristan, Tristan, Tristan… que
dire de cet homme de 35 ans, qui, lui, a gardé le souvenir de ses précédentes
incarnations et qui ne trouve pas plus simple que de manigancer pour faire
venir sa belle en France, puis d’attendre quatre ans pour la rencontrer en se
faisant passer pour un stagiaire, alors qu’il aurait été plus facile et
vraisemblable, puisqu’il l’avait localisée, de faire le touriste à Londres, de
la rencontrer « par hasard » et de la séduire, comme font les gens
dans la vraie vie quoi. Cela lui aurait quand même fait gagner du temps et
aurait semblé plus cohérent que cette abracadabrantesque histoire. Le
personnage en lui-même ne m’a pas séduite, trop creux. Pour finir, nous avons
Alex, le meilleur ami homo d’Aisling (rappelez-vous le cahier des charges dont
j’avais déjà parlé, il y a toujours un meilleur ami homo sexy et parfait et/ou
une meilleure amie déjantée et délurée) qui arrange des retrouvailles en club
échangiste, tout va bien, tout est normal.
Revenons
sur l’intrigue. Une fois tout ce petit monde réuni, où veut nous emmener
l’auteur ? Eh bien à une réinterprétation du mythe de Tristan et Iseult. Exit l’IML, le stage, les dons de Showy qui ne
servent pas à grand-chose (vendeuse en boulangerie borgne c’était pareil, je
vous dis !), tout cela passe à la trappe, on se concentre sur le couple
dont l’un a conscience d’être la réincarnation du célèbre héros tandis que
l’autre n’en a aucune idée. Ne cherchez pas à savoir s’ils se réincarnent à
chaque génération ou pas, pourquoi, comment, tout ça c’est de la construction
d’univers, étape tellement bâclée que ce dernier est limite inexistant. Et là,
pouf, sorti de nulle part, un premier voyage dans le temps, à la cour du roi
Marc’h, voyage qui ne sert strictement à rien mis à part se tripoter dans les
couloirs. Il y en aura deux autres, peut-être plus utiles, mais, arrivée à ce
stade du roman, ce dernier n’était pour moi qu’un gros WTF, je n’étais plus à
ça près. Les héros vont rencontrer une des ancêtres de la jeune femme, qui,
pour une femme du VIème siècle est drôlement moderne et à l’aise, mais je ne
suis plus à une incohérence près, au point où j’en suis. Ces voyages vont
permettre à Aisling de prendre conscience de la réalité de sa situation et
surtout de la force de son amour. L’auteur a une vision très romantique, que je ne partage pas, de Tristan et Iseult,
mais ce n’est pas ce qui m’a dérangée, même si j’ai grincé des dents quelques
fois au passage.
En
résumé, Par-delà la vue est un roman
qui n’est pas abouti, tant dans son intrigue que dans sa narration. Au-delà de
l’absence des qualités d’écriture nécessaires à un bon livre, il manque déjà le
travail minimum de recherches (l’IML, le tram qui passerait dans le Vè
arrondissement de Paris, j’en passe et des meilleures, non, faut pas déconner,
il y a au minimum Google quoi). J’ai été extrêmement déçue par ce livre ; l’auteur
s’est sûrement fait plaisir en l’écrivant, mais on aurait dû en rester là.
C'est fou comme c'est toujours les livres qu'on n'a pas aimés qui font les plus gros pavés en critiques ^^
RépondreSupprimerBon, moi aussi j'aurais pu craquer juste à cause de la couv et de la 4e, mais grâce à toi je m'épargnerai cette dépense inutile (quoique, dans quelques jours j'aurai probablement oublie qu'il ne faut pas que je l'achète...)
Ma Dory préférée <3
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